CultureCoutumes & TraditionsValenki les bottes feutrées russes

Valenki les bottes feutrées russes

Symbole de la Russie les valenki russes sont des chaussures d’hiver traditionnelles. Inutile de vous dire que leur fonctionnalité est indispensable quand la température devient critique. Savez-vous d’où elles viennent ? Comment sont-elles faites ? Je vous explique tout dans cet article.

Temps de lecture estimé : 13 minutes

Petite histoire des Valenki en Russie

Les scientifiques et les archéologues s’accordent à dire que l’histoire de ces chaussures d’hiver commence avant notre ère. Les premières preuves de l’utilisation du feutre sur le territoire du pays concernent le IVe siècle avant J.-C. : des archéologues ont trouvé des restes de laine feutrée dans des couches de permafrost dans des tumulus des montagnes de l’Altaï. Les peuples qui y vivaient en recouvraient les yourtes, et la laine était utilisée pour fabriquer des coiffures et des vêtements. De nombreux articles ménagers en étaient faits à l’époque : nattes, couvre-lits, tapis, certains éléments de vêtements (même la doublure des cottes de mailles), couvertures de chevaux et bien d’autres choses encore.

L’avantage le plus important de l’utilisation de produits en feutre est la polyvalence de ce matériau : il n’est pas chaud en été et pas froid en hiver, et c’est un excellent matériau d’évacuation de l’humidité. Les historiens du costume pensent que les peuples nomades ont inventé les chaussures en feutre. Et avec eux – pendant le joug mongol-tatar – les valenki sont apparus dans les villes et villages russes.

Les valenki sont même mentionnées dans le célèbre « Conte de la campagne d’Igor », qui, soit dit en passant, date du XIIe siècle. Bien sûr, nous ne pouvons pas parler de la ressemblance extérieure avec la version moderne, car la botte en feutre d’une seule pièce n’est apparue dans l’Empire russe qu’au début du XIXe siècle. D’ailleurs, ce produit était un luxe tant il était onéreux, et tous les paysans du pays ne pouvaient pas s’offrir de telles chaussures. Bien sûr, avec le développement de la production, les valenki sont devenus plus abordables.

De nos jours, dans certaines régions du nord de la Russie, elles sont encore largement utilisées en cas de fortes gelées.

valenki

Qui a inventé les Valenki ?

Bien que les valenki soient, dans notre perception, fermement associés à la Russie, les historiens pensent que le prototype de cette chaussure, apparemment 100% nationale, nous est parvenu avec la légendaire Horde d’or. Les modèles actuels n’ont rien à voir avec ceux de l’époque, attribués aux tribus nomades d’origine turque ou mongole.

Le nom « valenki » lui-même ne peut être associé à un personnage historique particulier, car, il s’agit d’un héritage linguistique populaire. Avant de s’appeler valenki, il y a eu plusieurs sonorités, valenokh, katanok, katanki, samokatki, chesanki, valenuhi, valezhki. En tout cas, le nom de ces chaussures reflète la méthode de fabrication.

Aux XVIe-XVIIe siècles, les bottes en feutre étaient fabriquées en Sibérie et dans certaines régions du nord. Le travail manuel était minutieux, les valenki se faisaient pendant de longues heures. Les manchettes étaient moulues séparément, puis cousues à de courtes chunyas ou pimas – nom des bottes courtes en laine en Sibérie. On a appris à fabriquer des chaussures d’une seule pièce dans le comté de Semenov, dans la province de Nijni Novgorod, au XVIIIe siècle. Dans les villages, les valenki restaient des chaussures chères et précieuses – parfois elles étaient les seules pour toute une famille.

Les valenki de type industriel n’ont été fabriqués qu’un siècle plus tard. Les premières usines de feutre sont apparues en Russie et les chaussures sont devenues plus populaires – à la ville comme à la campagne. En effet, que ce soit par temps froid ou chaud, les pieds en valenki restent secs et chauds. Ces chaussures ne  » rétrécissent  » jamais et ne déforment pas le pied.

L’effet thérapeutique des chaussures en feutre est largement connu: il réchauffe bien les articulations et maintient le pied au sec et à la chaleur. Toutes ces propriétés ont rendu les bottes en feutre très populaires en Russie avec ses hivers froids. Les valenki étaient indispensables tant sur les fronts de la Seconde Guerre mondiale que sur les chantiers de construction en Sibérie. À l’époque soviétique, les fonctionnaires du parti, le personnel de commandement de l’Armée Rouge et les chefs des riches fermes collectives recevaient des valenki spéciales – les fameuses burkas, faites de feutre blanc, doublées de cuir et équipées de semelles en cuir.

La fabrication des velenki

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Les « recettes » de fabrication des valenki étaient gardées secrètes et transmises par héritage.

Avec le développement de l’élevage de moutons en Russie centrale, dans la région de la Volga, dans la province de Tver et de Nijni Novgorod, l’artisanat du feutre est né. Pour fabriquer une paire de valenki, il faut environ 1 kg de laine. C’est à peu près la quantité de matière que vous pouvez obtenir si vous coupez toute la laine d’un mouton de race ordinaire et faites un nettoyage complet de la laine. Tout au long de l’histoire de ces bottes, l’essence même de la production n’a pas changé, ce n’est que récemment que des machines électriques sont venues aider les gens à certaines étapes de la production. En principe, la fabrication d’une botte en feutre est un travail manuel qui comporte plusieurs étapes.

Le lavage

Tout d’abord le nettoyage et le lavage de la laine. Elle doit être séparée des différents débris. Elle est donc lavée dans une variété de solutions, puis séchée (Auparavant, les artisans mélangeaient du savon, de la soude, et une solution faible d’acide sulfurique avec la laine obtenue.).

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Le peignage

Vient ensuite le peignage. C’est souvent à ce stade que les métiers à tisser sont utilisés, car la laine propre est détachée et enroulée sur des rouleaux pour former des bobines. Commence le façonnage de la future botte, uniquement à la main. On leur donne une forme semblable au produit fini, mais beaucoup plus grande.

Le feutrage et le séchage

Par la suite, le feutrage et le séchage. La botte en feutre elle-même est découpée à l’aide d’un pochoir spécial. Une attention particulière est accordée à l’épaisseur de la semelle, qui est appliquée sur une épaisse couche de laine, car elle doit assurer la longévité des valenki. La base préparée est enveloppée dans un chiffon humide et soigneusement damée pour que la laine épaisse s’y installe. Une fois la botte feutrée, elle est rétrécie à la taille souhaitée, à la main ou dans une machine spéciale, et posée sur un embauchoir exposée à la vapeur et à l’eau chaude. Le tout est séché pendant 6 heures à haute température.

Pour accélérer le processus de rétraction, on utilisait du sulfate de cuivre et, à l’époque soviétique, de l’acide sulfurique. Mais ces valenki n’étaient pas très respectueuses de l’environnement.

De nos jours, il est courant de produire des valenki avec des semelles pour les rendre plus polyvalentes. Dans les régions où l’hiver s’accompagne principalement de neige fondue sur les routes, il est préférable de privilégier les modèles spécialement traités pour de tels cas.

Les usines de feutre modernes utilisent une méthode sans acide. L’étanchéité souhaitée est obtenue par un certain régime technologique, combinant des cycles de laminage et de hautes températures. Les bottes en feutre sont écologiques et plus douces. Les garnitures et les formes des valenki présentent également une fabuleuse diversité : broderies, appliques, strass et même plumes colorées d’oiseaux exotiques. La forme des valenki peut aussi être très variée.

Propriété curatives des chaussures en feutre

Les valenki ont des propriétés anti-allergiques, analgésiques et anti-inflammatoires.

Les fibres de laine naturelle ont une grande capacité thermique, ce qui permet aux pieds de ne pas geler dans le froid de l’hiver.

Les valenki sauvent les pieds non seulement du froid, mais aussi de la chaleur et améliorent ainsi  la circulation sanguine.

Les pieds dans des valenki ne transpirent pas. Les fibres de la laine sont perméables à l’air. Cela permet aux bottes d’absorber et d’évaporer parfaitement l’humidité. Enfin et c’est le plus important, les valenki en laine naturelle vous remontent le moral !

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Les valenki au musée

Quatre musées des valenki sont ouverts en Russie : à Moscou, à Myshkin, à Kineshma et dans le village mordovien d’Urusovo. On y trouve des valenki d’officier qui étaient portés par les policiers militaires il y a cent ans et des valenki de l’époque de la Grande Guerre patriotique. Les valenki des partisans caréliens ont des crochets spéciaux pour les skis, et les chaussures chaudes des hussards du musée Myshkin ont des éperons.

Où se procurer des valenki en Russie ?

Je ne connais qu’une seule vraie adresse et c’est celle du musée des valenki à Moscou. Il se trouve au 2-y Kozhevnicheskiy pereulok 12 non loin du métro Paveletskaya. Là-bas, en plus du musée, vous pourrez faire vos emplettes dans l’énorme magasin.

Quelques anecdotes sur les valenki

Autrefois, les valenki étaient considérés comme un cadeau précieux et posséder ses propres valenki était un luxe.

Trouver son futur mari

Voici une utilité insoupçonnée des valenki: comme dit plus haut, avoir ses propres valenki était signe de richesse. Il était une tradition qui se passait la veille de Noël et qui consistait à aider les jeunes filles a trouvé leur futur riche mari. Les jeunes filles se regroupaient et jetaient une valenki en l’air. Suivant la direction que pointait l’orteil en retombant, cela indiquait l’endroit où vivait le futur mari.

Acheter une taille au-dessus

Sur les valenki, comme sur les palmes, il n’y a ni droite ni gauche (sur un modèle sans semelles bien sûr). De plus, elles rétrécissent uniformément avec le temps, vous devez donc acheter ces chaussures une taille au-dessus.

Le plus grand et le plus petit

La plus grande valenki est à Saint-Pétersbourg. C’est l’artiste Valeria Loshak qui l’a imaginée et conçue. Elle a utilisé 300 kilogrammes de laine de mouton. La longueur du pied est de 5 mètres et sa hauteur est de 6 mètres. Il lui a fallu 3 jours pour assembler la pièce sur place, située sur la berge du canal Obvodny. Il y a une porte dans la zone du talon, par laquelle n’importe qui peut entrer à l’intérieur pendant l’hiver glacé et se réchauffer à 3 personnes maxi. Le plus petit exemplaire de valenki au monde est à Omsk depuis 2012, la longueur de la semelle ne dépasse pas 3 mm.

Le précédent détenteur du record était une botte en feutre de Kineshma, haute de 168 centimètres. Il est aujourd’hui conservé au musée Kineshma Valenok.

De la création maison à la mode

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Vous pouvez faire des valenki vous-même. En effet, depuis peu, le feutrage de la laine est un passe-temps très populaire, et on trouve beaucoup d’informations sur la fabrication maison de ces fameuses bottes sur Internet.

Ces dernières années, ces chaussures russes traditionnelles ont gagné en popularité dans les milieux de la mode. Les top models les portent sur les podiums des plus grands pays du monde. Bien entendu, le look de ces « nouveautés de la mode » est quelque peu modifié pour s’intégrer plus facilement dans la vie quotidienne des grandes métropoles. Mais l’essence-même  de la botte ne change pas : elle est chaude, naturelle et sent l’esprit russe.

Conseils et astuces pour un stockage correct

Si vous avez trouvé les valenki de vos rêves et que vous voulez les conserver au mieux, voici quelques conseils:

  • Les tenir à l’écart des autres produits en fourrure et en laine.
  • Inspectez régulièrement pour vous assurer qu’elles n’ont pas été endommagées par les mites.
  • Vos valenki ne doivent jamais être stockées dans des pièces humides ou mouillées. Le sous-sol et le garage ne sont pas adaptés. Sinon, les chaussures perdront leur qualité et se détérioreront.
  • Ne pas laver les valenki mais simplement les passer sous l’eau. Elles perdraient leur forme et leur taille diminuerait.
  • Les sécher de manière naturelle.
  • Pour protéger les bottes en feutre de la saleté, vous pouvez les recouvrir de vieux bas de nylon.
  • Si vous avez de la boue sur vos chaussures, ne les lavez pas à l’eau mais brossez-les après séchage.
  • Si la température extérieure est supérieure à – 8°C, des galoches en caoutchouc doivent être portées par-dessus les chaussures.
  • N’oubliez pas de nettoyer la saleté après le séchage, afin qu’elle ne s’incruste pas dans la laine.
  • Si vous avez des valenki de couleur claire, il existe un moyen populaire de les nettoyer : avec de la semoule. Saupoudrez de la semoule sur la surface sèche de la chaussure et frottez-la avec un chiffon sec. Secouez le reste. La semoule va absorber la poussière et la saleté de la surface.
  • En cas d’accumulation importante de poussière et de saleté, la surface du matériau peut être aspirée.

Les règles et les conseils pour conserver ces chaussures chaudes sont assez simples. Si vous les respectez, vous pourrez garder vos pieds au chaud pendant plusieurs hivers.

4.6/5 - (28 votes)

5 COMMENTAIRES

  1. J »adore…je voulais justement savoir où en trouver, maintenant, c ‘est fait, grâce à vous. Dans les années 90, c’ était assez facile, i’ y en avait partout… Les classiques.
    Merci

  2. Article tres interessant, inclut l’historique.

    Je les porte en ecrivant ce commentaire …. c est doux confortable et chaud a souhait !!

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